La Russie en train

J 444 à 458 / de Vladivostok à Vyborg / 3 trains / 10 000 km

  • du 22 juin au 06 juillet 2017
  • Vladivostok – Moscou
  • Moscou- St Petersbourg
  • St Petersbourg – Vyborg

 

Nous voici déjà aux pays des rennes et du soleil de minuit, à quelques kilomètres du cercle polaire arctique,  alors que nous vous avions laissé à Vladivostok. Il est temps de rattraper le retard. Ophélie s’est collée au clavier (en rose dans le texte), prenez place dans le TransPanardien, enlevez vos chaussures ou vos tongs, détendez-vous, enfermez vos gosses dans le placard, on vous emmène jusqu’aux portes de l’Europe.


La machine à remonter le temps – 10 000 km de l’Asie vers l’Europe et 7h de décalage horaire

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La Ligne Rouge

A 1h du matin, après un contrôle de nos billets et de nos passeports par notre steward, nous avons l’autorisation d’embarquer dans le train. On dit au revoir à Egor et on commence à prendre nos marques dans ce wagon. Quand je monte, je sens une odeur de pieds qui puent, je constate que les espaces pour mettre les bagages sont petits et je suis bien contente à ce moment de me dire que nous n’avons pas les vélos et nos 10 sacoches avec nous. Ça aurait été impossible à caser.

On commence à voir nos compagnons de voyages, en face de nous : une grand-mère avec sa petite fille Irina, adorable, à côté un couple de retraité …

Une fois le train parti et nos draps pour la couchette récupérés, un rituel se met en place, les gens sortent leurs vêtements confortables en mode «pyjama» avec les chaussons qui vont bien. Nous sommes partis pour 7 jours et 7 nuits dans ce train sans douche.

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Au début du voyage, j’avais un peu peur que les Russes soient bruyant mais ils sont calmes. Une des choses qui nous a choqué pendant ce trajet est que beaucoup d’entre eux n’ont pas d’activités dans le train. Ils dorment ou regardent par la fenêtre. Pas de lecture, pas de jeux … Étrange.

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Au début j’étais super contente qu’une grand-mère avec sa petite fille soit en face de moi car je me suis dit «cool, elle va être sympa et tranquille» et bah non, ça ne se passera pas comme ça !!!!

En faite, c’est une «babouchka» complémentent cinglée. Pendant ces 6 jours, elle demandera aux deux dames qui s’occupent de l’entretien de notre wagon de stopper la climatisation en prétextant que sa petite fille est malade. Ok, elle tousse un tout petit peu mais condamner tout le monde à une chaleur de +30°dans le wagon n’est pas très sympa. En faite, comme la mamie a froid dés qu’il faisait +25°C, elle mettra en place plusieurs stratagème pour arriver à ses fins. Puuuuuuuuces numérotééééééééées pour vous donner un échantillon !

  1. Se plaindre qu’il fait froid et demander à stopper la climatisation – tout les jours
  2. Tendre le bras entre sa couchette et la nôtre pour sentir les courants d’airs – toutes les heures
  3. La gamine trempée de sueur car elle était trop habillée – tout les jours
  4. Demander de l’aide à un jeune militaire sur la couchette du dessus pour scotcher du papier journal sur la grille de ventilation – 5 ème jours
  5. Mettre une couverture autour de soi – 6 ème jours
  6. Mettre un drap en mode cabane autour de sa couchette pour ne pas sentir les courants d’airs – 6 ème jours
  7. Mettre un pull de plus – jamais fait
  8. Demander l’accord de ses voisins pour stopper la clim – jamais fait

En plus de cette comédie sur la température du wagon, alors que tout le monde est en t-shirt, short ou pantacourt car il fait chaud, on aura droit à des festivités assez comique comme le caca et le pipi de la petite fille dans un pot de chambre troué puis réparé avec du scotch lorsque nous sommes en train de manger, prendre toute la place sur la table commune pour y déposer ses affaires, faire venir un docteur la nuit pour l’ausculter …

Je sais ce que vous pensez, vous allez dire «oh, mais elle est méchante Ophélie». Ok, je veux bien reconnaître que ma patience a des limites restreintes mais j’ai du mal à supporter ce genre de comportement surtout lorsque tu arrives du Japon ou tout le monde est poli, courtois, zen et respectueux avec autrui. J’ai pris une sacrée claque !

Je pense que le plus dur pendant ces 7 jours de train est la promiscuité avec les gens. Tout le monde,doit faire des concessions pour que cela fonctionne. Parfois, ce n’est pas facile de se contenir et ne pas péter un câble. J’avais beau lui dire «niet» (non), elle n’en faisait qu’à sa tête. J’ai quand même réussi à me contenir et à faire abstraction de tout ça.

Mais la chance a tourné en notre faveur lorsqu’elle descendra du train au bout du 6ème jour et qu’elle sera remplacée par un nouveau voyageur, un monsieur de 66 ans, très grand et baraqué, d’une gentillesse incroyable. Voila la magie du voyage !IMG_4209

Ce monsieur, qui s’appelle Youri, nous donnera plein de nourritures qu’il avait préparé lui même. On se fera un super repas à 4, avec nous, Youri et le jeune militaire en mode festin dînatoire avec bière et vodka. Il offrira même un couteau à Fred et nous laissera ses coordonnées téléphoniques en cas de problèmes. Il communiquera avec Fred en allemand durant son passage éclair dans le wagon. Trop gentil !

Côté occupation, Fred bouquinait, regardait des films sur le PC et il a sympathisé avec Romane, un policier Russe parlant anglais qui était dans le compartiment derrière nous. On passera des bons moments avec lui et Mira un japonnais qui voyage en Europe pendant 4 mois avec sa moto. Lui aussi va devoir attendre quelques jours pour récupérer son véhicule avant de filer en Scandinavie.

De mon côté, je ne ferais pas grand chose, à part manger, dormir, lire, tricoter, regarder quelques séries sur le PC. Les journées sont interminables car il fait tout le temps jours et on a du mal à savoir quelle heure il est, doit-on dormir ou attendre encore …

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Notre train fut (passé simple !!!) bloqué 3 à 4 heures avant d’arriver au lac Baikal à cause d’un déraillement d’un wagon marchandise. Nos arrêts furent alors limités à 5 à 10 minutes au lieu des 20 à 30 minutes habituels pour rattraper le retard et arriver à l’heure à Moscou. On nous donnera de l’eau et de la nourriture comme des purées déshydratées, le repas préféré de Fred durant ce voyage en train.

Mon autre préoccupation pendant ces 7 jours de train était mon problème de cheveux sales. Impossible de prendre de douches. Donc, j’ai imaginé plusieurs solutions : se mouiller les cheveux, utiliser des lingettes en mode shampoing, acheter du citron et se badigeonner les cheveux avec le jus ?

En faite, je ne ferais rien. J’apprendrais même que l’on pouvait prendre une douche pour 150 roubles dans le wagon restaurant. J’ai décidé de ne pas y aller, la flemme car il ne restait plus que 3 jours. Ah quoi bon y aller si c’est pour remettre les même vêtements. Autant attendre d’arriver à Moscou et prendre une vrai douche.

C’est une sacrée expérience de voyager aussi longtemps dans un train. En tout cas, je sais que maintenant je ne me plaindrais plus de la longueur d’un trajet en France de 4h30 de porte à porte entre Chantilly à Granville lorsque je rentre chez mes parents. C’est rien du tout !

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A mon tour, c’est MON blogueuuuuuu !

 

Bolinos – Bouleaux – Dodos

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Génial ce transsibérien ! Ça serait à refaire, on résignerait tout de suite, même Ophélie et son récit mettant en avant l’unique côté négatif (la vieille peau frileuse qu’on aurait dû attacher aux rails dès le 2eme jour).

Nous avions choisi la 3eme classe pour une raison de coût (320 € pour nous 2, soit 2 à 3 fois moins cher que la seconde classe) mais surtout pour être à fond dans l’ambiance populaire de ce train mythique. Beaucoup de gens croient que c’est une sorte de croisière de luxe avec panneaux lambrissés, plateaux en argents, serveurs en cols blancs et rideaux de velours. Pas du tout, même en 1er classe ça reste assez roots. Je crois qu’il y a un amalgame de fait avec l’Orient Express, un train de luxe pour riches croyant vivre une aventure. Le Transsibérien est un train purement utilitaire et nos compatriotes de 3emes classes sont des russes n’ayant pas les moyens de prendre l’avion (1 heure d’avion = 1 jour de train).

Un wagon platzcart (3eme classe) est un espèce de grand dortoir composé de 8 compartiments, sans portes ni rideaux, avec 6 lits chacun : 2 séries superposés se faisant face (perpendiculaires au wagon) et 2 autres dans le couloirs (dans la longueur, les places pourris les moins chers). A un bout du wagon il y a 2 cabinets de toilette avec un petit lavabo; à l’autre un distributeur d’eau bouillante bien pratique pour les nouilles, la purée, se brûler les doigts en se servant ou le thé que les russes boivent à toute heure. Ce n’est pas un samovar, les locaux appellent ça un Titan, il marche à l’électricité ou au bois en cas de panne de cette dernière. C’est une pièce maîtresse, les repas de plus de 45 personnes dépendent de ce truc.

Ça fait serré au début mais on s’y fait vite, on sent que les russes ont l’habitude, la vie s’organise calmement, tout est bien rangé et la routine s’installe rapidement. Des futons et oreillers rendent le couchage confortable et nos provodnitsa distribuent des draps et serviettes étonnamment propres.

Les provodnitsa sont les responsables du wagon, elles sont 2 afin de se relayer sur toute la durée du trajet. Elles veillent à la propreté des lieux et au timing des arrêts. On s’attendait à avoir des matrones autoritaires et inflexibles, on aura en fait 2 nanas souriantes et serviables.

On prend place, Ophélie sur la couchette du bas, moi dans le clapier du haut, comme d’habitude. Je ne peux pas me tenir assis, je ne vois presque pas le paysage, mes pieds dépassent un peu mais je suis tranquille là-haut et je peux aller squatter en bas entre 2 siestes. La sieste et les repas sont les 2 grosses activités dans le train.P1120630 Il y a ensuite bouquiner, mater des films sur le netbook, faire la queue aux toilettes, remonter sa montre d’une heure chaque jour et regarder si c’est toujours des pins et des bouleaux qui défilent par la fenêtre. Pins… bouleaux…pins…bouleaux…pins… oh un lac ! Le Baïkal ! Sensationnel à 4h du matin, au levé du jour ! Ça donne furieusement envie d’y revenir un jour, en hiver pourquoi pas. Ce lac, que les russes appellent mer, est la plus grande réserve d’eau douce liquide au monde avec ces 600 km de long sur 50 de large et une profondeur atteignant 1600 m. En volume d’eau, c’est l’équivalent de la mer Baltique.IMG_4187

On aime bien ces paysages, l’écorce des bouleaux tranche sur le vert ambiant, on traverse des belles rivière, des villages isolés qui n’ont pas dû beaucoup changer depuis la fin de l’URSS. Les maisons sont en bois, non peintes, les routes non bitumées. Les fenêtres sont doublées avec une vingtaine de centimètre entre chaque pour isoler, l’hiver doit être terrible. La plupart des maisons ont un grand potager ceint d’une haie en bois. Ici on fait pousser du rustique, du productif, du qui se garde bien, du nourrissant, du bon : des patates !

Au dessus de moi, il y a beaucoup de place pour mettre des bagages mais je ne vois pas trop comment on aurait pu y caser les vélos + les sacoches.

Le train à peine partis j’entends parler anglais dans le compartiment juste derrière. Gros coup de bol, il y a non seulement Mira (un motard japonais qui était dans le même ferry que nous, seul autre étranger du train) mais aussi Romane le policier russe anglophone. Sultan le Kirghize de Osh, Tatiana la prof de dessin, Nikita et son frère revenant de leurs services militaires complètent ce tableau. On passera pas mal de temps avec eux, Romane servant souvent d’interprète. On se marre bien, derrière un visage parfois grave, les russes sont loin d’être les derniers pour rigoler apparemment. Même sans vodka je précise. Même si Mira se buvait 2 ou 3 apéros tous les soirs et que quelques rares bouteilles se cachaient sous les draps, l’alcool est interdite, les provodnista y veillent.

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Côté bouffe, on a fait comme les locaux : gros sacs de provisions (nouilles instantanées, biscuits, chocolat, fruits, chips, doigts de bébé…) et on complétait au hasard des arrêts soit dans les kiosques soit auprès des baboushkas vendant leurs produits sur le quai, c’était bon mais nos estomacs ont un peu de mal à passer de la diététique Asie au lourd et gras de la Russie. On a mangé des sandwichs à la purée, véridique.

Lors d’un arrêt prolongé au 3 ème jour, on prend le risque avec Romane de s’éloigner de la gare pour aller se rafraîchir dans la rivière. Le train peut repartir à tout moment, c’est un peu stressant mais on crève de chaud et la vieille peau a fait couper la climatisation une bonne partie de la journée. On est tout fier de dire aux autres que nous on s’est lavé nous, on a remis nos t-shirt poisseux mais on est propres nous ! En plus on s’est sifflé une bière dans un kioske sur le quai, des gros rebelles, yeahhhh !!

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Et finalement le temps passe vite, on s’ennuie très peu, on dort bien. On avait prévu de faire plein de choses et on n’aura même pas le temps : le bonnet d’Ophélie n’a que 3 rangs de plus, je n’ai pas lu une seule page de Guerre et Paix ou d’Anna Karenine (de toute façon, ils font trop peur ces bouquins, je ne les lirais que si je suis en prison un jour), on n’a fait qu’un bracelet chacun, que quelques grilles de Sudoku, et on a appris que 3 ou 4 mots de russes, déjà tous oubliés à ce jour.

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Yuri, le costaud sexagénaire aux yeux de husky venu remplacé la vieille sorcière et la mignonne Irina (sa petite fille qui lui servait d’alibi pour faire couper l’air frais), est venu clore ce séjour en beauté. C’était pas un sac à dos qu’il avait mais une corne d’abondance d’où est sorti une grande bouteille de bière, des fioles de vodka, des boulettes de viande, du bon pain de seigle, des œufs durs, un gros poulet rôti et un morceau de lard à damner un taliban. Il nous faisait nos tartines et surveillait nos verres afin de refaire le plein dès que nécessaire, ou même avant.

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du bon gras

 

C’était une semaine hors du temps aux journées de 25 heures (oui, ça ne veut rien dire), une somnolence nomade, une hibernation en mouvement, une traversée finalement trop rapide de la Sibérie, un dortoir sur rail, un voyage immobile, une belle façon de revenir vers l’Europe. J’ai dévoré les livres-univers de GJ Arnaud La compagnie des glaces, j’ai adoré le transsibérien.

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Réponses aux questions de l’article précédents :

  • Va t-on mourir d’ennui ?  Pas du tout comme vous venez de le lire. De toute façon, après une scolarité normale et les cours de douane de l’ISTELI, on peut subir bien pire sans broncher (genre les routes finlandaises…).
  • Ophélie va t-elle se raser le crâne ?  La propreté est une notion relative. Si autour de toi tout le monde a les cheveux gras et le même t-shirt depuis 4 jours, pif paf pouf, tu ne te sens plus si sale finalement. Perso, j’ai réussi à me laver entièrement, shampoing compris, dans les chiottes du train. En partie pour me sentir bien et ne plus subir mes aisselles, en plus grande partie pour narguer Ophélie.
  • Ais-je vomi ? Non, heureusement que l’alcool était interdite. J’aurais jamais eu le temps de descendre de ma couchette. J’aurais été dans de beaux draps, ah ah.
  • Record du nombre de jour avec le même t-shirt et boxer ? Explosé, même si j’ai changé au bout de 4 jours (et 4 nuits). Je suis très fier, je sens que j’ai accompli un truc qui me dépasse.
  • Peut-on rigoler avec des russes sans jouer à la roulettes ? Grave ! Et même sans être bourré !

 

On arrive à Moscou le 29/06 à l’heure et sommes contents de marcher un peu et de quitter ce train. On décide d’acheter nos billets pour St Saint-Pétersbourg dès notre arrivée pour ne pas à revenir dans une gare plus tard. Je ferais la queue à un guichet pour rien car on me dira qu’il faut aller à la gare d’à côté pour acheter les billets. En France, dans n’importe quelle gare tu peux acheter un billet de train pour n’importe quelle destination. En Russie, ça ne fonctionne pas ainsi. Tu dois acheter ton billet dans la même gare ou tu es censé prendre ton train.

Par chance, on tombe sur des jeunes volontaires qui parlent anglais car Moscou acceuille la Coupe des Confédération de football. La jeune fille nous aidera à commander nos billets pour Saint Saint-Pétersbourg sauf que je commettrais une erreur en achetant les billets. Le départ sera le 02/07 au lieu du 03/07, je m’en apercevrais le lendemain en examinant les billets. En faite, on sera bien content de rester moins longtemps à Moscou que ce que l’on avait prévu car on trouve la ville trop grande et il n’y a pas grand chose à faire. On se dit que c’est mieux de passer plus de temps à St Saint-Pétersbourg pour visiter et espérer que nos vélos arrivent avec de l’avance.

Une fois cette mission remplie ainsi que l’achat d’une carte sim pour internet, on empreinte le métro pour rejoindre Pavel à son lieu de travail. Lui et sa femme Tatiana sont nos hôtes Warmshower pour deux nuits à Moscou.

On le rejoint dans un atelier ou il est employé. L’atelier est situé dans un sous-sol dans les quartiers huppés de Moscou, il travaille pour la marque Brompton. Autour c’est Hermès, Jaeger-Lecoultre, Vuitton, Mont-Blanc, Louboutin et plein d’autres marques pour les riches ou ceux qui veulent le paraître.IMG_4247

Fred est comme un fou et parle mécanique vélo avec Pavel. On laissera nos sacoches dans son atelier pour se balader un peu dans Moscou et visiter la place rouge. On doit attendre 20h que Pavel ait terminé son travail pour aller chez lui à 30 minutes du centre de Moscou en prenant le Métro et une sorte de TER.P1120679

C’est jolie la place Rouge, il faisait beau quand on est arrivé. En repartant, le ciel s’est couvert, du coup la place rouge était grise.IMG_4224IMG_4236P1120658

Le métro de Moscou a la réputation d’être le plus beau du monde et c’est vrai qu’il est impressionnant : beaucoup de marbre, des statuts, des plafonds très hauts, des lustres et peu de publicité. Mais bon, ça reste un métro : un endroit souterrain bourré de monde et hyper bruyant, donc pas notre tasse de thé. Il descend très profondément, il était censé servir d’abris anti-atomique lors de la guerre froide.

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On avait envie d’aller voir un turc gaie et amusant alors nous avons visité le musée du Goulag.

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C’était intéressant mais on sent que ces années folles ne sont pas encore bien assumées ou alors que les russes préfèrent les oublier. Ou peut-être que Staline est encore populaire pour certains.

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Le musée est minuscule en comparaison de l’ampleur des déportations, de l’injustice et des conditions de vie des prisonniers-travailleurs. On s’étonne que nul part n’est mentionné le nombre des victimes. Il y a bien une carte de la Russie énumérant le nombre -impressionnant !- de travailleurs ayant transités dans chaque camps, mais c’est comme si tout le monde était ensuite rentré gentiment chez lui.IMG_4290

12 millions de morts de 1939 à la mort de Staline en 1953.

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Ce sont eux qui ont posé une grande parti des rails du transsibérien, merci les gars.


 

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Pavel

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Tatiana, guettant l’orage

Nous restons 2 nuits chez Pavel et Tatiana avant de reprendre un train couchette pour St Petersbourg que les russes appellent Peter pour faire court. Seulement une nuit cette fois, du gâteau, on est comme à la maison. Je dors mieux dans le train, j’avais l’impression que le lit bougeait chez Tatiana et je me réveillais la nuit en me croyant dans un wagon. De plus il ne fait plus vraiment noire la nuit, le soleil se couche plus ou moins vers 23h, il fait vaguement sombre ensuite puis c’est le grand jour dès 3h du matin. On ressert l’élastique de nos précieux masques de nuit, garants de notre sommeil pour les semaines à venir.

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A Peter, on marche péniblement avec nos sacoches à bout de bras jusque chez Olga qui nous acceuille jusqu’à ce qu’on récupère nos vélos. A côté de chez elle se trouve un grand centre commercial : Auchan, Leroy Merlin, Decathlon, Spar et même Castorama. Ça sent déjà la bonne vieille Europe !

Le Spar nous rend dingue et on s’organise un bon petit apéro un soir. Ophélie nous régale une fois de plus avec son Tiramitsu. Pas de crumble cette fois, pas le temps, car nos vélos arrivent avec 2 jours d’avance et on a hâte de retrouver notre routine et notre chez nous. Faut pas croire, on est assez casaniers et si le jardin change tous les jours, la tente reste notre home sweet home.

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On reste tout de même 3 nuits chez Olga et ça nous laisse le temps d’user mes cales SPD sur les trottoirs de la Venise du Nord, du fait des canaux qui rappellent le Disneyland italien.IMG_4324

C’est très beau. Coup de cœur pour la Cathédrale Saint-Sauveur-sur-le-Sang-Versé, déjà rien que le nom en jette pas mal. C’est sûrement là qu’allait prier Rambo.

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Mais le meilleur moment de ce séjour a été les retrouvailles avec Marcel et Claudine, 2 cyclos qu’on avait rencontré à Puerto Natales puis à Ushuaïa, en 2014. Entre temps, ils ont croisé nos collègues Tom & Flo, les Cyclomigrateurs en France et dernièrement Alice et Benoit en Thaïlande. Le hasard fait que nos routes se croisent ici, aux portes de l’Europe. On est hyper content de les revoir, c’est une belle surprise qu’ils nous ont fait.

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Comme ils aiment boire du Pastis tous les soirs, avec des glaçons svp, ils voyagent désormais en camping-car, les traîtres !! Y’a même une mini-douche à l’intérieur ! Et Marcel est tout fier de nous montrer le super matelas, le sommier du futur et le tuyau qui leur soufflera de l’air chaud quand ils «camperont» en Asie Centrale. Pendant ce temps Claudine bougonne en nous servant de la terrine de chevreuil : «ouais bah moi j’préfère toujours le vélo». Bien parlé ! Vas-y Claudine, travaille-le au corps, insiste, fatigue-le, ùassacre-le ton Marcel ! Tu crois que j’ai fait comment pour convaincre Ophélie de repartir les pieds devant ?

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Heureusement, ils ont embarqué les vélos et tout leur matos de voyage, nul doute qu’on les reverra tantôt du bon côté de la Force. Et puis vu la claque qu’on a mis au Pastis, ils n’auront bientôt plus aucune raison de garder leur camion.

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On visite la ville ensemble, on reparle urine et effet venturi comme au bon vieux temps de la Terre de Feu et dégustons un met fin de la cuisine locale : le kebab. Une tuerie.

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On file à la société de fret récupérer nos montures, intactes. Pour ceux que ça intéresserait, c’est la société JDE (www.jde.ru). Au top, tout était emballé en caisse bois.

 

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On passe la dernière nuit à SPB sous la tente près du monster-truck, dans ce petit camping à 2 pas de la gare ferroviaire pour la Finlande. On nous a déconseillé de rejoindre Vyborg (dernière ville russe avant la Finlande) à vélo car la route est très empruntée et pas jojo.

Alors au matin, après un p’tit dej’ au chaud dans le Marcel’s Heavy Duty Mountain Killer, on dit à plus tard à nos copains futur-ex-camping-cariste et filons vers la gare. Une séance de freefight pour passer les sacoches au scanners et on embarque dans l’ultime train russe. Il y a de la place pour les vélos et la contrôleuse ne dit rien malgré les dimensions hors norme. La SNCF, c’est génial, une fois que t’y as goûté, tu trouves tous les autres trains supers et pas chers. Rappelons au passage que les vélos-couchés, les tandems et les remorques sont officiellement interdits dans les trains SNCF. Je crache mon mépris aux dirigeants qui pourrissent le service publique.

 

Arrivés à Vyborg, on avait prévu de filer directement en Finlande, de faire 50 km, de camper au bord d’un lac avec des bébés rennes, de faire un feu de camp, de construire une cabane en rondin, de danser le jerk… mais on a un gros coup de flemme : faut faire les courses, ça caille et faut pédaler en plus, c’est trop nul.

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Alors on se pose dans une auberge de jeunesse, visitons la ville qui a son petit charme avec ses vieilles rues pavés et ses immeubles abandonnés et dépensons nos derniers roubles dans un resto Macron. C’est quoi un resto Macron ? Bah c’est beau, ça présente bien, on comprend rien au menu, on commande sans vraiment être emballé et on bouffe un peu de la merde au final. On aurait dû se refaire un kebab.

A bientôt pour la suite sur la belle Via Karelia finlandaise.

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centre-ville de SPB, le Poutine’s style

 

 

Du Sushi au Bortsch – les Pieds en Russie

J 439 à 444 / Sakaiminato à Vladivostok / du 17 au 22 juin 2017

 

Facilement reconnaissable à sa grosse tête ronde et sa face aplatie, le coréen ressemble beaucoup à un chinois, ou à un japonais ayant pique-niqué un peu trop près de Fukushima. Comme les gnous, ils sont bruyants et se déplacent en troupeau compact, aveugle et pressé. Très pressé. Son plus grand prédateur, le panardos sauvage, roi du bitume au tempérament relativement asocial, est immédiatement désarmé par le nombre et l’invasion soudaine de son territoire : la salle d’attente du ferry.

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Après 10 semaines au pays du calme et du civisme, son instinct de survie est anesthésié, relégué au rang de fonctions inutiles telles que «se battre pour sa place dans la file d’attente» ou «donner un coup de coude à la connasse qui pousse dans le dos». Non, le panardos se contente de feuler dans son coin, acculé, menaçant simplement de ses dents de pédalier les jarrets et valises passant trop près. Mais même ses dents ne font plus peur, trop propres, nettoyées qu’elles ont été du terrible sang de l’effort : le cambouis.

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La femelle panardos se terre dans un fauteuil, le regard affolé, les aisselles moites, repensant déjà avec nostalgie à l’île de la zénitude dont elle est chassée sans même l’avoir encore quitté.

Le mâle panardos, qui n’a du lion que l’odeur et le signe zodiacale, se laisse pathétiquement flatter la crinière par une coréenne lui disant qu’il a de beaux yeux. Et il ronronne ce con. Il ne pense même pas à balancer des petits jets d’urine vicieux pour marquer son territoire.

Bref, notre séjour au Japon se termine d’un coup, sans transition grâce à ce troupeau de touristes coréens, équipés comme s’ils venaient de grimper l’Everest et excités comme une blogueuse mode devant la nouvelle collection printemps-été de Pimkie. C’est vraiment des bourrins ces coréens, ils embarquent dans un ferry aux places réservées et numérotées comme si c’était le dernier métro. De toute manière, qu’est-ce qui ne paraîtrait pas rustre et chaotique après un pays comme le Japon ?

 


BILAN JAPON

  • Surprenant, un paradis du voyage à vélo. Surpeuplé sur le papier, sauvage, calme et préservé en réalité. Routes très tranquilles et pistes cyclables très fréquentes. Le pays est beau, propre, verdoyant. Notre parcours nous a fait découvrir un pays de pêcheur, l’image très urbanisée qu’on peut avoir du Japon fait oublier que c’est une île toute en longueur et qu’on est très rarement à plus de 100 km de la mer ou de l’océan. Et bordel ce qu’elle est belle la côte, impossible de s’en lasser.
  • Des gens souriants, polis, très accueillants, profondément gentils et généreux. En tant que blancs, de surcroît sur des vélos de cirque, on est des stars. En dehors d’Hiroshima et Kyoto, nous n’avons vu presque aucun gaijin et seulement 5 ou 6 voyageurs à vélo. En 2 mois et demi, c’est très peu.
  • Des convenients stores (épiceries) un peu partout qui rendent le voyage confortable : eau bouillante à disposition, toilettes du futur avec cuvette chauffante et jets coquins, wifi gratuit et parfois tables et chaises pour pique-nique de luxe sous la climatisation.
  • De l’eau du robinet potable, partout !
  • De nombreux parcs publiques où l’on peut camper sans problème. Toilettes propres, toujours. Et des douches parfois en bord de plage. En fait c’est presque des campings gratuit tellement c’est bien foutu.
  • Une météo presque parfaite de début avril à mi-juin. Le presque est pour les 6 jours de pluie. Nuits fraîches, journées chaudes mais pas trop.
  • Pas si cher qu’on le croit, nous avons dépensé moins de 28 € / jour en moyenne pour 2 tout compris (logement, bouffe et transport dans le pays) et sans se priver sur la bouffe et un peu de confort. On faisait nos courses le plus possible dans les supermarchés discount et trouvions parfois en route des fruits et légumes aux prix acceptables. Ceci dit, on a souvent mangé la même chose : pain de mie le matin, sandwich au pain de mie le midi et spaghetti le soir. Nous n’avons pas trouvé de flocons d’avoine, c’est sans conteste le plus gros défaut de ce pays. Et leur beurre de cacahuète est dégueulasse, j’étais furax.

En chiffre :

  • 3407 km et 25 000 m de grimpette
  • 74 jours dont 55 sur les biclous
  • 37 bivouacs de psychopathe + 10 nuits en accueil + 15 en camping + 10 en AirBnB
  • 2 ours, dont 1 mort dans un supermarché discount. L’autre court encore, traumatisé.

 

Suite du récit

On découvre également nos premiers russes. Après 8 mois et demi en Asie, on les trouve grands, costauds et très hétérogènes, forcément. Certains ont des vrais têtes de truand, genre Vladimir Poutine, mais en pantacourt. Du coup ça rassure, on peut pas être méchant avec un pantacourt, c’est pas crédible. C’est comme une Kalachnikov rose.

Des têtes de légionnaires, de petites frappes, des regards bleus acier, des traits durs taillés à la serpe, des nez cassés à la Belmondo, des mines renfrognés, parfois des cernes, peu de sourires. Ça fait un peu cliché mais c’est frappant. Les asiatiques ont presque tous des têtes de gentil, même Kim Jong-un ne fait pas vraiment flipper, et globalement le sourire facile. Nos perceptions ont besoin d’un étalonnage. J’imagine le choc pour ceux qui passent directement de la Thaïlande au RER parisien ou à la banlieue de Cologne sous la grisaille, y’a de quoi vomir son goûter.

P1120585On finit par embarquer dans le ferry, en tout dernier, pas la force de se battre, pas la peine. Les vélos voyageront en soute dans un conteneur pour les bagages volumineux. On rejoint notre cabine, dortoir de 8 qu’on partage avec des russes – ouf – on préfère ça aux gnous. Ils sont sur leurs smartphones et répondent à peine à notre bonjour-hello-priviet. Le Japon est déjà bien loin. Mais il ne faut pas se fier aux 1ere apparences, pas avec les russes. On fait vite connaissance avec les sympathiques Andrei et Igor, ils parlent un peu anglais et ont un petit business de moteur de bateau d’occasion entre le Japon et Vladivostok. Le made in Japan, même d’occasion, reste bien plus qualitatif qu’un tas de boulon soviétique.

On mange nos nouilles instantanées pendant qu’une déferlante de gnous s’abat sur le restaurant de bord. Après c’est la douche, façon onsen japonais, tous à poil dans la même pièce avec bassin d’eau brûlante, douches et une vue magnifique sur la mer. Je me douche avec des jeunes coréens d’une école militaire. Ne comptez pas sur moi pour dévoiler leur intimité. Bon, m’enfin juste un indice : bouchon de champagne.

Le lendemain midi, l’Eastern Dream fait une escale de quelques heures à Donghae en Gnoulie, plus connue sous le nom de Corée du Sud; à ne surtout pas confondre, mais alors surtout pas, avec la Missilie, plus au nord. On décide de rester à bord, le port n’invite pas à la balade champêtre et la ville est trop loin. Le bateau est calme, on profite avant la nouvelle fournée de coréens.

Bizarrement, nous changeons de cabine et passerons la 2eme nuit dans un grand dortoir d’une quarantaine de lit.

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comme chez les putes, on tire le rideau et on se couche

Le soir, un russe veut nous payer le dîner au restaurant. On refuse, on a plein de sachets de nouilles. Mais il insiste, il dit qu’on a besoin d’une bonne nourriture pour être fort sur les vélos. Ok, il nous prend par les sentiments, nous acceptons et défonçons le buffet à volonté.

Ce russe, c’est le tout premier qu’on a rencontré dans le terminal du ferry au Japon. Mine terne et triste, yeux fatigués, presque un vampire. Il ne faut pas se fier aux 1eres apparences, surtout pas avec les russes. Pour les touristes coréens, on peut en revanche, pas de soucis. On a pu les admirer boire de la bière dès 7h du matin, c’est bien des bourrins. Hmmmmmmmm que c’est bon de stigmatiser et généraliser !!

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Le ferry accoste à 14h à Vladivostok, ville de bout du monde sans le charme d’un Ushuaïa ou d’un Saint-Germain-du-Teil, mais dont les grands ponts, les nombreux navires commerciaux, la brume et les rues en pente forte font inévitablement penser à San Francisco. Les nanas à la douane ne sont que 3 ou 4, on poireaute un moment dans le ferry avant de pouvoir descendre et récupérer les vélocipèdes sur le quai. Un jeune garçon manqué russe vide une bouteille de vodka pour patienter, elle l’avait commencé ce matin, son visage bouffi témoigne d’un entraînement intensif.

Passeport en règle (on flippe toujours un peu dans ces moments), passage des sacs aux rayons X et – grande première – chien renifleur. La pauvre bête a dû souffrir au niveau de la sacoche vêtement.

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Nous voilà enfin en Russie, il est 18h. Egor (prononcé Yégor) est notre hôte warmshower et a eu la grande gentillesse de venir nous chercher et de nous attendre pendant 1 heure. On charge les sacoches dans son petit 4×4 et le suivons dans le dédale de rue en pente. Donc oui, pas mal de ressemblance avec San Francisco, mais en version discount : vieux immeubles délabrés et routes défoncées.

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Le trafic intense des sorties de bureau nous empêche de contourner les chaos, on se fait bien secouer par la chaussée et frôler par les bagnoles. On roule à nouveau à droite (c’était à gauche au Japon) et sommes surpris de voir les volants toujours à droite. Tout est à droite, comme la politique en France. Explication d’Egor : 99% des voitures de Vladivostok sont des occases nippones, la même histoire que pour les moteurs de bateau.

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On arrive à destination dans un quartier d’habitation pittoresque. On adore, on est tout de suite dans le bain, dans l’ex URSS, dans un nouveau monde, entre le marteau et la faucille, excitant. Digicode mécanique, façades délabrées, linge séchant dehors, portes en acier, austérité carcérale.IMG_4077

On salue les gens d’une inclination de la tête, vieux réflexe asiatique dont il va falloir se débarrasser, on nous regarde bizarrement.

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Egor nous confie les clefs, il habite chez sa copine et on sera chez nous pendant 3 jours, génial. Wifi, cuisine équipée et lave-linge qui fait la petite musique à la fin. Egor retourne à son atelier de réparation de vélo, activité dans laquelle il s’est lancé après un voyage à 2 roues entre l’Indonésie et la Chine. Il est très occupé,on ne le reverra qu’à notre départ. Il bosse pas mal sur des vélos chinois, genre Merida, même neufs y’a des truc à réparer ou bricoler. Ce qui est un point commun avec la plupart des vélo-couchés, soit dit en passant.

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En allant faire nos courses dans la rue, on retrouve des choses de l’Asie Centrale : les même cordonniers, les mêmes petits kiosques vendant n’importe quoi, le même pain, le même fromage (sauf les petites boules blanches atomiques d’Ouzbekistan), les même biscuits, le même choix pléthorique de Vodka, les même sardines en boîte… M’enfin tu crois que c’est des sardines et quand tu l’ouvres quelques jours plus tard dans le transsibérien, tu tombes sur des espèces de doigts de bébés. Très bon.IMG_4160 On retrouve avec joie des stands de rue vendant fruits et légumes à des prix normaux, mais aussi des poissons séchés qu’on n’a pas encore osé goûter. Des mots reviennent en mémoire pour Ophélie, la mienne est désespérante. «Vada» pour l’eau « Piva » pour la bière, «spasiba» pour dire merci, «a din» pour «un», «tva» pour «deux», «shiott» pour «l’addition». Voilà, c’est à peu près tout. On retrouve aussi le «At Kouda ? = «d’ou es-tu», LA question qu’on avait eu de Ouzbékistan au Kazakhstan.

 

On passe la journée du lendemain à stresser comme des fous au sujet du transport des vélos. On consulte des blogs de voyageurs (je déteste faire ça !!!) et imaginons le Tetris impossible que serait le chargement de nos tanks au-dessus des couchettes dans le train. Et pourtant j’étais vraiment un dieu du Tetris sur la GameBoy, concerts de violons et décollages de fusée. On se voit déjà en train de se faire cracher dessus par le contrôleur (genre Zangief dans Streetfighter) et lyncher par nos compagnons de couchette parce qu’on prend toute la place, parce que le petit Vladimir s’est pris un coup de pédale dans la gueule et que le guidon a cassé le bocal de cornichons molossol d’Evgenia, la babouchka de 120 kg au regard mauvais et au menton poilu, celle qui faut absolument pas faire chier. Egor va se renseigner à la gare le soir, pour lui y’a pas de soucis, y’a un wagon bagage et on a la faiblesse de le croire alors qu’on sait que c’est extrêmement peu probable. Et effectivement, c’est mort qu’il nous dit au téléphone. On déclenche le plan B, celui qu’on aurait dû mettre a exécution dès le matin, au lieu de se faire un ulcère pour rien.P1120620

Alors on se lève tôt le lendemain et pédalons 7 km jusqu’aux locaux d’une société de fret trouvées sur internet (oui, grâce à un blog de voyageur…). Vladivostok n’est décidément pas du tout une ville de vélo mais c’est folklo et ça nous fait du bien un peu d’action. Le site internet de la compagnie était hyper bien foutu même si complètement en cyrillique. Sur place, c’est différent. On est dans une zone industrielle assez glauque, même au standard russe. Au standard japonais, on pourrait parler de décharge publique post-apocalypse, ambiance rouille et herbes folles.

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On est à la bonne adresse, celle donnée par les coordonnées GPS, et portant il n’y a pas d’écriteau, juste une allée menant à un sorte de terrain vague avec un garde à l’entrée. On avance timidement vers lui et lui expliquons «tlanspoltt velocipete St Petelsboulgue, da ?», très important de rouler les «r». Il nous fait comprendre qu’on doit aller remplir un formulaire («folmoular») vers les hangars au fond de la cour puis aller payer dans les bureaux à côté («Bioulo»). Des gars du dépôt nous accueillent, ils ressemblent à ceux avec qui on bossait dans nos jobs , des gars en or, les moins bien payés tout en étant les plus indispensables dans toute boite logistique : doudounes manches courtes, godasses de sécurité, souriants et très serviables. Ils pèsent et mesurent les vélos puis les sacoches (63 kg en tout) qu’ils ont réunis et scellées dans un grand sac en toile, remplissent le formulaire et dasvidania les vélos !! Petit pincement au cœur mais gros gros soulagement de ne pas avoir à se les trimbaler. Ils iront directement à St Petersbourg, on voyagera léger avec seulement 2 sacoches chacun. Au bioulo, on tombe sur une nana adorable parlant quelques mots d’anglais. On paye 160 €, ce qui est bon marché vue la distance, environ 10 000 km, et surtout les galères en moins. Les vélos arriveront à destination dans 15 jours, et y’a même un tracking. Pour finir, elle nous appelle un taxi en fixant le prix d’avance, nous évitant probablement une belle quenelle. Et voilà, mission accomplie, l’ulcère dégonfle d’un coup et on profite de la journée du lendemain pour se balader dans la ville, sous le soleil, fait assez rare parait-il, et fêter l’anniversaire d’Ophélie, fait annuel.P1120603

Ça fait bizarre de se dire que c’est la 2eme fois qu’on le fête sur la route, c’était à Kars la dernière fois, au nord-est de la Turquie. Il y a peu de restaurants ou alors ils sont bien planqués, on échoue sur la terrasse d’un bar restaurant branchouille ayant l’avantage d’avoir un menu en anglais et des petites couvertures pour se protéger du vent frisquet.

IMG_4114Faut savoir que si Vladivostok est à la même latitude que Perpignan, il y fait tout de même -20°C en hiver. Ophélie opte pour la spécialité locale : hamburger frites et pinte de mojito. Je tente l’aventure du bœuf stroganoff et d’un smoothie aux légumes. Tortoise en dessert, ça sonnait français mais c’est sûrement un truc pour bûcheron sibérien vue la lourdeur du bestiau.

 

IMG_4102Egor passe nous prendre le soir, nous emmène faire un tour en ville et admirer la baie du haut d’un belvédère.

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Vers minuit, il est temps de rejoindre la gare. Sur nos billets, le départ est le 22 juin à 18h mais c’est l’heure de Moscou. Pour Vladivostok, 7 fuseaux horaires plus loin, c’est en fait le 23 juin à 1h du matin.IMG_4110 L’arrivée sera le 29 à 11h, c’est parti pour un séjour sur la plus longue ligne de chemin de fer du monde qui a fêté ses 100 ans le 5 octobre dernier. C’est parti pour 9288 km dans un train mythique à travers la Sibérie. C’est parti pour 7 jours sans douche.


  • Ophélie va-t-elle craquer au bout de 4 jours et se raser le crâne ?
  • Fred va t-il encore vomir après 3 verres de vodka ?
  • Va t-il pulvériser son record du nombre de jour avec le même t-shirt et le même caleçon ?
  • Peux-t-on rigoler avec des russes (sans jouer à la roulette) ?
  • Allons-nous mourir d’ennui entre 2 sachets de noodles ?

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Réponses au prochain épisode.

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