- 07/03/14 Pampa Guanaco – près de l’estancia Menendez = 71 km
- 08/03/14 … – Rio Grande = 47 km
- 09/03/14 … – Tolhuin = 114 km
- 10/03/14 … – Lago Escondido = 49 km
- 11/03/14 … – USHUAIA = 59 km

…10 km nous séparent de la « ville » de Pampa Guanaco : 5 baraques et une mini-caserne de carabineros. On fait le plein d’eau et le gars nous file 7 petits pain. Comme on ne sait pas du tout nous rationner, nous les mangerons tous 20 km plus loin, à la frontière Chileno-Argentine.

les douaniers sont sympa et nous mettent une cabane à dispo pour manger
Sympa comme tout ce passage de frontière : une rivière glacée à traverser pieds nus. Par soucis médiatique, j’enchaînerais 3 traversées et aurais l’impression de marcher sur des moignons à la fin.

On continue notre chemin, toujours dans cette pampa grandiose. Le vent est froid et nous pompe pas mal d’énergie. Dès qu’on s’arrête, la sueur nous glace.

On se trouve un abri pour la nuit, un espèce de petit hangar ou des moutons doivent passer un sale quart d’heure. On relève brillamment le défi du montage de tentes tunnel sur un sol en béton !

La nuit, le vent souffle comme un dingue à plus de 100 km/h.

Le lendemain, dernier kils sur cette belle piste. Nous rejoignons la route 3. Vers la droite : vent puissant dans le dos direction Ushuaïa. Vers la gauche : tempête de face direction Rio Grande qui, même à 15 km, paraît très moche. Malheureusement, on n’a plus rien à bouffer et sommes obligés de faire le détour, aaaarrggghh !!

Dur dur de repartir après avoir été envoyé sur le côté
Avec nos VC, nous mettons 1h30 pour faire 15 km. Tom et Flo mettront plus de 2h et devront pousser un peu. Le vent soufflait à 90 km/h avec des rafales à 120. De face c’était sport, de côté c’était de la voltige. On se faisait envoyer dans le bas-côté où nos pneus dérapaient. Quand les voitures nous doublaient, ça créait un trou d’air terrible et on était content d’avoir nos rétro pour anticiper. Bref, c’était dangereux mais marrant. Comme le jeu du foulard ou la roulette russe, ah ah.
Rio Grande est une ville affreuse et on ne traîne pas : une parilla pour se remettre de nos émotions, le plein de bouffe, hôtel, douche (trop bon après 5 jours), lavage de 3 calbutes et on s’écroule.
En repartant le lendemain matin (8h + 1°C + nordet = ambiance télésiège encore une fois), je réalise qu’on est à l’embouchure du Rio Grande (oui, le vent rend con), ce fleuve qu’on avait quitté au mois de décembre, le jour mémorable de nos 10000 km.


Ils ont l’air d’en être fiers de leurs victimes
On roule bon train sur cette route dangereuse. On est dimanche et les argentins roulent comme des cons, comme d’hab. On vise la panaderia (boulangerie) de Tolhuin dont pas mal de cyclo nous avaient parlé. On s’attendait à un petit boui-boui isolé en bord de route. En fait, Tolhuin est carrément une ville et sa panaderia est un must-go très réputé. Et ils aiment les cyclistes puisqu’ils nous mettent à dispo une chambre et une salle de bain, juste derrière les cuisines.

On s’installe et d’autres cyclos débarquent. Un couple de japonais et Jérémy, un ami de Tom et Flo que nous avions également rencontré sur le Salar d’Uyuni, en novembre ! C’est dingue la mémoire, j’oublie plein de truc mais je me souviens d’un gars à qui j’ai parlé 10 minutes, y’ 5 mois.
Ophélie – 10h24 : « J’ressemble à une pétasse de Courchevel »
Rapport à son bandeau rose (trouvé par terre sur la carretera australe)

Les 2 jours qui suivent sont superbes. Nous roulons à 7, il y a moins de voiture, moins de vent et les paysages changent radicalement : plus d’arbres et plus de montagnes. Nous passons une nuit dans un bâtiment de la protection civile. C’est notre dernier bivouac. Alors que les autres dorment au chaud sur des matelas, nous préférons planter la tente dehors. On n’aime pas la promiscuité, des vrais sauvages.

La dernière étape est à l’image de notre voyage : géante !
Ça commence par une montée de col magnifique et ça finit sous une tempête de neige et 1°C. L’ambiance est terrible entre nous, on est tout content de rouler sous la neige même si on se caille bien en descente. Un finish façon Terre de Feu, extra !

On entre dans Ushuaïa par le port. C’est pas hyper beau mais ça a du charme.

Difficile de croire qu’il va neiger dans 5 minutes
On fonce au panneau « Fin del Mundo » (faut que je traduise ?) pour la photo. Pas le temps de faire ça bien sous une tempête de grêle !

On se dépêche ensuite de trouver un hôtel. Ophélie prend les choses en main, c’est la spécialiste pour trouver les coins confortables et pas chers. Moi, c’est plus les bivouacs gratos mon truc.

Je précise qu’on est encore en été
Certains cyclo nous avaient dit qu’il n’était pas intéressant de poursuivre après El Calafate. Je dis le contraire. On a passé plus de 3 semaines géniales dans le sauvage. Aller jusqu’à Ushuaïa n’est pas seulement symbolique; les paysages, la faune et la flore valent vraiment le coup. Goûter au climat de la Terre de Feu est aussi quelque chose de mémorable.

Voilà, c’est la fin de notre aventure américaine. Est-on heureux d’être arrivé à Ushuaïa après ce long périple ? Oui et non.
Nous sommes fiers, c’est sur. Fiers de quoi exactement ? j’en sais rien. On n’a rien fait d’utile, on n’a rien construit, on n’a aidé personne. C’était juste génial de pédaler dans tous ces endroits nouveaux, de rencontrer des inconnus tous les jours, de s’immerger totalement dans des paysages et des façons de vivre, d’avoir ce sentiment de liberté incroyable qu’on a au guidon d’un vélo. Une chaîne bien huilée, le plein d’eau et de bouffe pour quelques jours, pas trop de pluie et on est les rois du monde.
L’arrivée à Ushuaïa n’est donc ni un soulagement, ni une victoire, ni un déchirement. Faut pas déconner, on est super content et comblé, mais c’est un truc qui s’achève là.
Le bonheur n’est pas au bout du chemin, le bonheur est le chemin. C’est ce qui donne tant de sens et de beauté au voyage à vélo.
C’était mon moment poète. Pouet Pouet.

Comme il fait un temps de chiotte, on profite de notre séjour ici pour geeker à fond : mise à jour du blog, montage vidéo, bilan matériel… donc il y aura encore quelques articles sympa à venir.
On voudrait également écrire un article/interview, donc envoyez-nous vos questions et nous y répondrons. Comme ça, en France, on n’aura plus à répondre à :
- Alors, c’était bien ?
- Tu fais comment pour faire caca dans la nature ?
- Et pour manger ?
- Comment on fait un nœud de cravate ?
- C’est quoi un guanaco ?
- Combien de vitesse sur les vélo ?
- String ou caleçon ?
- Fred, c’est qui la blonde sur toutes les photos ?
- C’est bon le manchot ?
- Vous allez prendre un prêt, acheter une maison, faire des bébés, faire vos courses à Auchan le samedi, des heures sup’, du tuning sur le Doblo, regarder les matchs de Ligue 2 et passer des vacances normales au Grau-du-Roi au mois d’aout ?
- Mais la Patagonie, c’est au Chili ou en Argentine bordel ?
Allez-y, y’a moyen de rigoler.
Notre avion décolle le 16 mars et nous atterrirons le 17, tout prêt de chez nous.
A bientôt